Depuis 40 ans, les aliments ultra-transformés envahissent les rayons des supermarchés et prennent une part importante dans notre régime alimentaire. Des habitudes de consommation non sans risque pour la santé, en particulier lorsque l’on est diabétique. Le point sur ces « faux aliments » avec Anthony Fardet, chercheur en alimentation préventive, durable et holistique.
Qu’est-ce qu’un aliment ultra-transformé ?
Anthony Fardet : Pour repérer un aliment ultra-transformé (AUT), il faut lire la liste des ingrédients : plus elle est longue, plus il est transformé ! Les AUT se caractérisent par la présence d'au moins un marqueur d'ultra-transformation (MUT) comme :
- Des ingrédients purifiés et/ou dénaturés : sirop de glucose, isolats de protéines…;
- Arômes naturels ou artificiels;
- Des additifs dits « cosmétiques » destinés à modifier le goût, la texture, la couleur des aliments. Ils sont obtenus par extraction, purification ou par synthèse chimique : colorants, émulsifiants, liants, texturants, exhausteurs de goût, édulcorants…
Certains procédés mécaniques comme le soufflage et la cuisson-extrusion utilisés par exemple pour les galettes de riz blanc soufflés ou les céréales pour enfants, sont aussi des MUT. Beaucoup d’entre eux ont donc la particularité d’être totalement isolés de leur matrice alimentaire d’origine. Ils peuvent ainsi présenter des index glycémiques très élevés (c'est-à-dire les sucres) et ne contiennent presque plus de micronutriments protecteurs.
Comment le reconnaître ?
Anthony Fardet : Voici quelques astuces pour les repérer :
- La liste des ingrédients : au-delà de 5, il y a plus de 75 % de chance que ce soit un AUT. Et si le sucre apparaît en premier, fuyez !
- Méfiez-vous des emballages très colorés, des portions individualisées et des promotions.
- Attention aux allégations nutritionnelles qui attirent l’attention sur des nutriments et cachent la vraie nature des aliments. Certaines céréales du petit-déjeuner pour enfants (parfois avec un bon Nutri-score et indiquant “source de céréales complètes”) sont en réalité des AUT, et bien souvent des “bombes de sucres”.
Quel est l’impact de la consommation de ces aliments sur la santé ?
Anthony Fardet : Plus le degré de transformation, de dégradation et d’artificialisation de la matrice d’un produit est important, plus il impacte la santé. C’est ce que l’on appelle l’effet « matrice ».
La structure et la texture des aliments ingérés conditionne en effet le temps de mastication (donc la satiété et la régulation de la prise alimentaire), la vitesse de transit, la biodisponibilité des nutriments…
Les procédés d’ultra-transformation modifient donc la matrice des aliments de façon extrême et aboutissent à nous faire consommer plus que de raison, souvent au profit de plus de sucre, de sel, de gras et d’additifs. Par exemple, manger une pomme ou boire un jus de pomme industriel n’aura pas le même retentissement sur la santé. Ainsi, ces aliments, en raison notamment de la dégradation de l’effet “matrice ” à l’origine, perturbent le métabolisme (surpoids, syndrome métabolique*, stéatose hépatique, hypertension, hypercholestérolémie…) et augmentent in fine le risque de maladies chroniques plus graves.
Y a t-il des conséquences à cette consommation si l’on est diabétique ? Que faire ?
Anthony Fardet : Des études récentes ont montré qu’une grande consommation d’AUT peut augmenter de 37 à 44 % le risque de diabète de type 2 et de 81 % celui de syndrome métabolique, un état précurseur de maladies chroniques comme le diabète.
Les effets des aliments sur le diabète ont plus à voir d’abord avec la perte de l’effet « matrice » qu’avec les glucides. La transformation rend en effet les sucres plus bio-disponibles tout en éliminant une grande partie des fibres présentes à l’état naturel et en ajoutant des sucres simples à index glycémique élevé.
Il convient donc de réduire au maximum les AUT dans toutes les catégories d’aliments. Sachant que le régime alimentaire le plus protecteur privilégie la règle des 3 V : des Végétaux en quantité, de Vrais aliments, entiers et complets, et une grande Variété de consommation.
Pour en savoir plus :
“Halte aux aliments ultra-transformés ! Mangeons Vrai”. Anthony Fardet
www.anthonyfardet.com/
L’indice SIGA évaluant le niveau de transformation des aliments : https://siga.care/indice-siga/
*Le syndrome métabolique se caractérise par un tour de taille important (> 94 cm pour un homme et > 80 cm pour une femme), un taux élevé de triglycérides (>=1,7 mmol/L), un faible taux de cholestérol HDL (< 40 mg/dL pour un homme, < 50 mg/dL pour une femme), de l’hypertension artérielle et un taux de glycémie élevé. La manifestation d’au moins trois de ces éléments conduit au diagnostic.